Résumé
Un discours mathématique efficace doit mener à bien deux
tâches simultanément, l’analyse (au sens de Leibniz) et la référence.
La référence réclame un discours qui est typiquement plus concret,
présentant un affichage public clair des choses en question et une
taxinomie utile à leur propos; l’analyse, typiquement plus abstraite,
recherche les conditions de l’intelligibilité de ces mêmes choses et les
conditions de résolution des problèmes dans lesquelles elles
apparaissent. (Les choses mathématiques sont problématiques, et se
révèlent dans le contexte de familles de problèmes qui leur sont
associés). La question est alors celle-ci : comment ces discours
disparates peuvent-ils s’intégrer - se réunir dans le cadre d’une
relation rationnelle ? Dans cette présentation, je montre d’abord
comment les discours relatifs aux courbes elliptiques et aux formes
modulaires se sont intégrés en des résultats conduisant à la
démonstration de Wiles du dernier théorème de Fermat ; et je
montre alors que ces résultats, qui apparaissent dans le discours de
la théorie analytique des nombres se sont ensuite intégrés dans le
discours de la logique (la théorie des modèles). Le point
philosophique est que ce qui apparaît comme un discours ‘analytique’
dans un contexte, peut sembler être un discours ‘référentiel’ dans un autre contexte. De plus, ce qui demeure tacite pour un
mathématicien vis à vis d’un certain objectif, peut devoir être rendu
explicite pour un autre mathématicien, avec un objectif autre.
L’intégration de ces diverses perspectives produit souvent, et aussi
dirige, la croissance du savoir mathématique.